JLAR 2005
Ventilation chez l’obese
Gilles Lebuffe
Clinique
d’Anesthésie-réanimation,
Hôpital Huriez, CHRU de
Lille.
L’obésité est définit par
un indice de masse corporelle (IMC) supérieur à 30 kg/m2.
Elle devient morbide pour un IMC supérieur à 40 kg/m2.
La prise en charge anesthésique de ces patients présente
certaines particularités qui sont liées au retentissement de
l’obésité sur les fonctions essentielles de
l’organisme. Aussi, la fonction respiratoire de l’obèse est
caractérisée par une baisse de la capacité
résiduelle fonctionnelle responsable d’une diminution de la
tolérance à l’apnée et d’épisodes
hypoxiques periopératoires. Le mécanisme principal de cette
hypoxie est l’inégalité des rapports ventilation/perfusion
pouvant favoriser la survenue d’atélectasies.
Lors de l’induction anesthésique, la
préoxygénation doit être minutieuse et
réalisée pendant 5 minutes avec une concentration de
l’oxygène de l’air inspiré à 1. Elle est effectuée
au mieux sous contrôle de la fraction expirée en oxygène
maintenue entre 0,9 et 1 et en pression positive continue à 10 cmH2O
(Continuous Positive Airway Pressure ou CPAP) poursuivie, après
l’induction, d’une ventilation mécanique au masque facial
avec une pression positive expiratoire à 10 cmH2O [1]. Cette technique d’administration de
l’oxygène permet d’améliorer
l’oxygénation des obèses au moment de l’induction en
réduisant la formation d’atélectasies.
En peropératoire, l’altération des
échanges gazeux est aggravée par la laparoscopie qui est
responsable d’une altération de la compliance pulmonaire et des
résistances des voies aériennes. Les réglages initiaux de
la ventilation contrôlée visent à maintenir une normocapnie
(PaCO2 = 40 mmHg). Cet objectif est atteint le plus souvent en
majorant de 15% la ventilation minute des obèses par rapport à un
sujet mince. En cas d’hypoxie, l’augmentation de la fraction inspirée
en oxygène, du volume courant et de la fréquence respiratoire
s’est avérée inefficace [2]. En revanche, la réalisation prudente de
manœuvres de recrutement alvéolaire et l’instauration
d’une pression expiratoire positive permettent le plus souvent une
amélioration des échanges gazeux peropératoires [3].
En postopératoire, le risque
d’hypoxémie est accru chez l’obèse en rapport avec
les épisodes d’obstruction des voies aériennes et la
survenue d’atélectasies. Pour réduire la dysfonction ventilatoire
et l’hypoxémie, l’utilisation d’une pression positive
continue, éventuellement couplée à une assistance en
pression de la respiration spontanée comme la «bi-level
positive airway pressure » (BIPAP) peut être
proposée [3].
Au
total, l’oxygénation périopératoire est volontiers
compromise chez l’obèse ce qui nécessite un monitorage
rapproché et une stratégie ventilatoire basée sur la
prévention du collapsus alvéolaire.
Références :
1. Coussa M, Proietti
S, Schnyder P et al. Prevention of atelectasis
formation during the induction of general anesthesia in morbidly obese
patients. Anesth
Analg 2004;98:1491-5.
2. Sprung
J, Whalley DG, Falcone T et al. The effects of tidal volume and
respiratory rate on oxygenation and respiratory mechanics during laparoscopy in
morbidly obese patients. Anesth Analg
2003;97:268-74.
3. Tavernier
B, Lebuffe G, Pattou F. Anesthésie et réanimation pour traitement
chirurgical de l'obésité. Conférences d'actualisation
2003. 45ème Congrès national d'anesthésie et de
réanimation. Paris: Elsevier, 2003.