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Controverses

Arguments contre l’utilisation (simpliste) du monitorage BIS®.

 

Pr. Dan Longrois,

Dr. Etienne Junke,

Pr. Claude Meistelman

Pôle d’Anesthésie-Réanimation

CHU de Nancy

Hôpital Brabois-Adultes

4, rue du Morvan

54500 Vandoeuvre-les-Nancy

Email : d.longrois@chu-nancy.fr

 

 

Les arguments contre l’utilisation d’un monitorage en anesthésie pourraient être les suivants : (i) un rapport signal bruit trop faible et la présence de beaucoup d’artefacts qui rendent le monitorage inutilisable (mauvaises informations) ; (ii) performances diagnostiques trop faibles (informations correctes mais qui estiment mal la fonction physiologique monitorée); (iii) des informations mal interprétées qui perturbent le raisonnement médical et aboutissent à des décisions délétères pour les patients ; (iv) l’absence de bénéfice clinique mesurable (les informations fournies par le monitorage, même lorsqu’elles sont correctes ne diminuent pas la morbidité ou la mortalité) ; (v) un coût trop important.

Ce type de débat a déjà eu lieu pour le cathéter artériel pulmonaire (CAP), utilisé en pratique clinique courante depuis la fin de années 70. Pour le CAP, il a été montré que les performances diagnostiques sont correctes pour certains paramètres (débit cardiaque) et médiocres ou mauvaises pour d’autres (précharge ventriculaire gauche). Plusieurs études observationnelles avaient mis en évidence une association statistique entre l’utilisation du CAP et une surmortalité  . Clairement, il est difficile d’analyser l’impact d’un type de monitorage sur la morbidité et la mortalité sans avoir défini au préalable comment ce monitorage doit être utilisé et sans avoir vérifié si les recommandations concernant l’utilisation sont réellement suivies en pratique clinique. 

Ce même type de débat (pour ou contre le monitorage) existe maintenant pour les différents moniteurs dits de profondeur de l’anesthésie. Celui pour lequel l’expérience clinique et la plus répandue et les publications sont les plus nombreuses est le monitorage BIS® (Aspect Medical System, Newton, MA, USA) et nous allons tenter d’analyser les arguments potentiels contre son utilisation. En fait, il s’agit plutôt de limites de ce type de monitorage que d’arguments contre son utilisation.

 

Rapport signal bruit trop faible et la présence de beaucoup d’artefacts qui rendent le monitorage inutilisable 

 

Le moniteur BIS® utilise des informations obtenues à partir du traitement mathématique du signal EEG. Plusieurs sous-paramètres issus de l’analyse spectrale (ratio beta), de l’analyse temporelle et de l’analyse bispectrale (SynchFastSlow calculé sur plus de 1000 valeurs du bispectre et ayant subi une transformation logarithmique) de l’EEG sont utilisés pour le calcul d’un paramètre numérique unique, qui n’a pas de dimension et qui prend des valeurs entre 100 (patient éveillé) et 0 (EEG plat). La valeur de l’index bispectral est calculée par une formule mathématique complexe qui utilise les coefficients des sous-paramètres dont le “ poids ” relatif est pondéré de manière empirique. La manipulation des coefficients des différents sous-paramètres a eu pour but d’obtenir une relation linéaire (au moins en théorie) entre les valeurs du BIS d’une part et les concentrations des différents médicaments anesthésiques et les réponses cliniques (état de connaissance) d’autre part.

Depuis sa conception, le BIS a évolué en BIS 2, BIS 2.5, BIS 3 et, depuis 2001, en BIS 4.0. L’enrichissement de la base de données, le meilleur traitement du signal, la meilleure détection des artefacts ont permis de modifier l’algorithme pour lui permettre d’être plus performant et mieux refléter la composante hypnotique de l’anesthésie. La version BIS 4.0 représente un progrès surtout dans la reconnaissance et le rejet des artefacts de haute fréquence dont celles générées par le bistouri électrique. Une version pédiatrique du moniteur est disponible. 

Les différentes versions du logiciel qui permet le calcul de l’index bispectral ont permis un meilleur rapport signal/bruit en diminuant, sans les éliminer, les interférences induites par la présence des ondes de haute fréquence (> 40 Hz). Le moniteur affiche deux types d’information qui permettent de valider la qualité de la valeur calculée du BIS : l’index de qualité du signal et le signal de haute fréquence appelé aussi signal EMG.

L’index de qualité du signal

L’index de qualité du signal (IQS) est le paramètre affiché par le moniteur qui permet de valider le calcul du BIS. L’IQS est calculé sur 120 fenêtres de 2 secondes qui se superposent. Les 120 fenêtres superposées aboutissent à analyser 61,5 secondes d’EEG. Chaque fenêtre est cataloguée comme mauvaise (artefact irrécupérable) ou correcte. L’IQS correspond au rapport entre le nombre de fenêtres correctes sur le nombre total de fenêtres (120). La valeur du BIS clignote lorsque l’IQS est inférieur à 50 % (moins de 60 fenêtres correctes sur 120). La valeur du BIS ne s’affiche plus lorsque moins de 17 fenêtres sur 120 sont correctes. Il faut un minimum de 10 secondes d’EEG au moniteur pour calculer une valeur du BIS. Le système de reconnaissance des artefacts utilisé par le moniteur BIS est complexe et a évolué avec les différentes versions de l’algorithme du BIS. L’affichage sur l’écran du moniteur du graphique de tendance de l’IQS permet la validation de la qualité des mesures du BIS. Il existe très peu de travaux qui ont analysé les valeurs de l’IQS sur de longues périodes de temps dans l’environnement électromagnétique des salles d’opération. Il a été montré sur des enregistrement électroniques continus, réalisés chez des patients qui ont bénéficié d’une anesthésie pour chirurgie cardiaque que les valeurs de l’IQS étaient supérieures à 80 pendant environ 80 % du temps d’enregistrement  . Ceci permet d’affirmer que la qualité du signal est acceptable et probablement comparable et celle d’autres types de moniteurs (ECG, SpO2).

 

Les interférences avec les signaux de haute fréquence («signal EMG»)

Les signaux de haute fréquence (70-110 Hz) définis par le moniteur BIS® comprennent, en partie, une activité EMG vraie (30-300 Hz). Le fabricant a appelé ces signaux haute fréquence « signal EMG » pour des raisons de simplicité. Ce « signal EMG » est affiché en permanence sur l’écran du moniteur. Les interférences entre le BIS et l’activité EMG vraie sont complexes. Les hypnotiques comme le propofol diminuent l’activité EMG enregistrée avec un moniteur différent du BIS . La version BIS 4.0 élimine en grande partie ce problème d’interférence entre le « signal EMG » et les valeurs faussement élevées du BIS. Nous pensons néanmoins que le « signal EMG », tel qu’il est mesuré et affiché par le moniteur BIS® est sous utilisé en pratique clinique. En effet, le « signal EMG » augmente souvent (en l’absence d’une curarisation) quelques secondes avant l’augmentation des valeurs du BIS. Cette augmentation peut être utilisée comme un « signal d’alarme » supplémentaire qui doit inciter le médecin anesthésiste à analyser les causes de cette augmentation.

 

A partir des ces informations sur la qualité du signal, il est possible de décrire plusieurs situations rencontrées en pratique clinique :

1. L’appareil n’affiche pas de valeur du BIS car le signal est considéré comme trop mauvais (IQS trop bas). Cette situation survient le plus souvent lorsque le bistouri électrique est utilisé. C’est une situation fréquente mais elle concerne également d’autres types de monitorage (ECG par exemple). Le monitorage est inutilisable au moment de l’incision si elle est réalisée au bistouri électrique. Il s’agit d’une vraie limite qui peut être contournée par une titration des besoins du patient (voir plus loin) avant l’incision.

2. L’appareil affiche une valeur du BIS mais avec un IQS bas (entre 50 et 80). Cette situation est souvent associée à des valeurs élevées du signal EMG. Il faut être prudent dans l’interprétation des valeurs du BIS dans ce cas car il peut s’agir d’un signe précoce de réveil. Une interprétation des informations dans le contexte (doses/ concentrations d’hypnotique et de morphinique, niveau de stimulation nociceptive) permet de valider ou d’invalider les valeurs du BIS.  Une décurarisation peut être détectée avec les moniteurs de curarisation. Dans ce cas, si les concentrations d’hypnotiques et de morphiniques sont considérées comme correctes dans le contexte des besoins du patient et du niveau de stimulation nociceptive, l’administration d’un curare peut faire baisser les valeurs du BIS.

3. L’appareil affiche une valeur du BIS, une valeur de l’IQS > 80 mais un signal EMG > 30 dB. Il s’agit d’une situation difficile mais qui survient rarement. Dans ce cas, les valeurs du BIS sont souvent élevées. Le signal EMG > 30 dB peut être un signe qui précède de quelques secondes l’augmentation des valeurs BIS ou peut être le résultat d’un artefact (pompe de CEC par exemple ou un entraînement électrosystolique temporaire). C’est de nouveau une interprétation dans le contexte qui va permettre d’interpréter correctement la valeur du BIS.

            Les valeurs du BIS peuvent être incohérentes avec le contexte clinique parce que l’EEG est altéré (microvoltage congénital, accident vasculaire cérébral méconnu dans l’hémisphère où est placé l’électrode) ou parce qu’il est mal analysé (artefacts) par le moniteur. De manière générale, tout ce qui perturbe l’EEG en dehors des agents anesthésiques peut perturber le signal BIS  . Il existe un moyen relativement simple de diagnostiquer ces situations en analysant le tracé brut EEG qui est affiché en continu par le moniteur. Dans l’expérience des auteurs, l’analyse du signal EEG brut est la meilleure façon de valider la qualité du signal et du calcul. Lorsque cette information est analysée, il n’existe pratiquement pas de situations où le clinicien peut être « trompé ». L’apprentissage des profils d’EEG brut ne demande pas beaucoup d’efforts et représente une sécurité supplémentaire que tout utilisateur du BIS devrait inclure dans sa formation.

Il existe beaucoup de publications qui font état de situations où le BIS a été pris en défaut (voir pour une revue récente  . Ces situations existent, il est incontestable, mais elles concernent moins de 5 % de la durée d’utilisation du BIS. Ces mêmes difficultés existent pour d’autres types de moniteurs (ECG, pression artérielle, SpO2, etc.). Ce qui permet d’invalider les valeurs calculées pour l’ECG ou la SpO2 est ce que nous appelons une validation croisée des informations (comparaison des valeurs de fréquence cardiaque ou FC calculées par le monitorage ECG et par la SpO2 par exemple) ou l’analyse du contexte (il est peu probable que la FC soit à zéro lorsque les valeurs de CO2 téléexpiratoires sont à 35 mm Hg depuis plusieurs minutes).

Des résultats difficiles à analyser ont été récemment publiés où les auteurs ont étudié la variabilité intra-individuelle en comparant les valeurs du BIS calculées par deux moniteurs BIS® pour les deux hémisphères chez les mêmes patients  . Les auteurs ont montré qu’il existait, pour un faible collectif de patients, des différences importantes entre les valeurs du BIS fournies par deux moniteurs différents et que ces différences concernaient jusqu’à 11 % du temps d’enregistrement et portaient sur des périodes de plus de 30 secondes. Ces différences inter-hémisphériques, cliniquement importantes lorsque l’anesthésie est gérée sur des valeurs seuil de BIS, ont incité les auteurs à recommander à ce que le BIS ne soit pas le seul critère sur lequel la profondeur de l’anesthésie est estimée et l’anesthésie est conduite. Cette suggestion est cohérente avec notre recommandation d’interprétation contextuelle et de validation croisée des informations. Les informations les plus pertinentes pour la validation croisée sont les concentrations d’anesthésiques (hypnotiques et morphniques) prédites au niveau cérébral.


 

En résumé, le rapport signal/bruit et les valeurs du BIS sont corrects pour 80-90 % du temps d’enregistrement. Les problèmes d’interprétation les plus fréquents peuvent être résolus en analysant le tracé EEG brut. Pour les auteurs de cet article, ces limites ne sont pas des arguments contre l’utilisation du BIS mais des arguments en faveur de l’utilisation des informations fournies par le moniteur BIS seulement dans un contexte (clinique, pharmacologique, EEG).

 

Performances diagnostiques trop faibles

Le monitorage BIS® a été conçu, promu par le fabricant et accepté par les médecins anesthésistes comme un moniteur de la composante hypnotique de l’anesthésie. Un moniteur performant de l’hypnose pourrait être caractérisé par (i) des valeurs qui discriminent dans tous les cas entre un état de conscience et un état de perte de conscience, lors de l’induction de l’anesthésie, pendant l’entretien et lors du réveil ;  (ii) une relation linéaire entre les valeurs du BIS d’une part, les concentrations prédites au niveau cérébral et l’état de conscience.

 

Monitorage BIS® et discrimination de la perte/ retour de l’état de conscience

La valeur du BIS associée à une probabilité de 1 de perte de conscience est 60  

  1.  Autrement dit, les profils EEG pour l’induction et le réveil de l’anesthésie, pour un même patient ne sont pas symétriques.
  2. Le BIS est réellement à 60, le patient est conscient mais le BIS évolue dans les secondes qui suivent vers des valeurs plus élevées. Ce phénomène existe et est en relation avec le retard au calcul du BIS, phénomène également présent pour tous les types de moniteurs qui nécessitent un calcul à partir d’un signal brut  . Ce retard est d’autant plus important que le signal EEG est de mauvaise qualité et que la période de lissage du moniteur BIS est de 30 secondes et non de 15 secondes. Il s’agit d’une limite incontournable de tout type de monitorage qui fait appel à des calculs à partir d’un signal brut. Ce phénomène existe le plus souvent en présence d’une stimulation nociceptive et d’une concentration cérébrale insuffisance de morphinique.

L’absence de valeur du BIS qui discrimine dans 100 % des cas la perte de conscience (et l’absence de mémorisation explicite) est également une limite importante qui doit être connue. Les auteurs utilisent une procédure de calibration patient par patient, pour un niveau de stimulation nociceptive submaximal (intubation trachéale) et pour un niveau de stimulation très faible (présence de la sonde d’intubation trachéale en l’absence de toute autre stimulation). De surcroît, en présence de morphiniques (rémifentanil 4-8 ng/ml), nous utilisons une valeur cible de 50. Cette valeur est de 40 en présence de faibles concentrations de morphniques (rémifentanil 1-2 ng/ml). En plus nous travaillons systématiquement avec les alarmes activées (10 de plus que la valeur ciblée).

 

Effets des hypnotiques sur le BIS : linéarité versus non linéarité des relations concentrations d’hypnotiques-valeurs du BIS.

Les valeurs du BIS d’un sujet conscient et non prémédiqué varient entre 91 et 100 (95 + 2) En théorie, les valeurs du BIS diminuent de manière linéaire avec l’augmentation des concentrations de la majorité des hypnotiques comme le propofol, le thiopental, le midazolam, et l’isoflurane, habituellement utilisés pour induire une amnésie et la perte de conscience  

            La non linéarité de la relation concentrations d’hypnotiques-valeurs du BIS est une limite important à l’utilisation du BIS. Ce problème n’a pas été correctement abordé dans la littérature. Dans l’expérience des auteurs, ce problème n’existe pas pour tous les patients. Lorsqu’il existe, il est possible de déterminer patient par patient deux points d’inflexion, le point d’inflexion « de réveil » (les valeurs du BIS augmentent si les concentrations sont diminuées en dessous de ce seuil) et le point d’inflexion de surdosage (les valeurs du rapport de suppression deviennent > 0 lorsque les concentrations d’hypnotiques augmentent). Entre ces deux points d’inflexion, les valeurs du BIS peuvent être inchangées pour des modifications cliniquement importantes des concentrations d’hypnotiques. Cette non linéarité est probablement en relation avec l’EEG et non avec le moniteur BIS car il a été mis en évidence sur les valeurs calculées du FFS  et a été retrouvé par les auteurs des cet article avec d’autres types de moniteurs qui analysent le signal EEG.

En résumé, les performances diagnostiques du BIS ont des limites qui doivent être connues par les utilisateurs.

 

Informations mal interprétées qui perturbent le raisonnement médical et aboutissent à des décisions délétères pour les patients.

Des « fausses » valeurs du BIS peuvent aboutir à des interprétations erronées. Dans l’immense majorité des cas, les fausses valeurs du BIS sont élevées et elles entraînent un surdosage anesthésique.  Ceci a été abordé plus haut. En dehors de ces situations, il existe peu de publications qui ont analysé les changements de raisonnement médical lorsque les informations fournies par le monitorage BIS sont prises en compte. Dans une étude récente réalisée chez des patients anesthésiés pour une chirurgie cardiaque, il a été montré que lorsque les informations qui proviennent du moniteur BIS sont fournies aux médecins anesthésistes, leur raisonnement est modifié et des modifications de la conduite de l’anesthésie sont fréquentes  . Ces résultats suggèrent, que le plus souvent, les informations fournies par le monitorage BIS sont complémentaires aux autres informations qui permettent de conduire l’anesthésie.

 

Impact de l’utilisation du monitorage BIS® sur la morbidité et la mortalité anesthésique

L’expérience clinique et les publications concernant l’impact clinique (« outcome » des anglosaxons) de l’utilisation du moniteur BIS ont suivi plusieurs étapes.

La première étape a consisté à démonter la capacité du moniteur à analyser le tracé EEG et à calculer des valeurs corrélées avec d’autres signes de profondeur de l’anesthésie (mouvements ou réactions hémodynamiques à des stimuli nociceptifs  . Cette approche de prédiction du mouvement et des réactions hémodynamiques a été abandonnée à partir de 1997. Elle a été remplacée par une approche dont l’objectif était de montrer que le moniteur BIS pouvait fournir des informations complémentaires par rapport aux signes cliniques habituels utilisés pour l’estimation de la profondeur de l’anesthésie (signes hémodynamiques par exemple )

La deuxième étape a été caractérisée par l’étude des relations entre les concentrations mesurées ou prédites d’hypnotiques d’un côté et les valeurs du BIS et des signes cliniques de profondeur de l’anesthésie de l’autre côté   

La troisième étape a été celle de la mise en évidence des bénéficies cliniques potentiels du monitorage BIS. Le bénéfice clinique a d’abord été mis en évidence sur la diminution de la consommation des agents hypnotiques et sur la diminution des délais de réveil et du séjour en SSPI    Ces résultats suggèrent que certains patients subissent un sous-dosage en agents hypnotiques. Il existe également quelques travaux qui suggèrent, sans le démontrer, que l’utilisation du monitorage BIS permet de détecter le surdosage anesthésique  

 

Utilisation du moniteur BIS et doses cumulatives d’agents hypnotiques.

Plusieurs études ont prouvé que l’utilisation du monitorage BIS s’accompagne d’une diminution des doses cumulées d’hypnotiques (propofol, sévoflurane, desflurane) d’environ 30 %   . Ces résultats suggèrent que l’utilisation du BIS permet de diminuer le surdosage anesthésique. Ceci pourrait expliquer la diminution de l’incidence des nausées et vomissements.

Ces résultats, confirmés par plusieurs groupes, sont contredits par plusieurs études récentes. Ainsi, une étude publiée en mars 2005 et qui a randomisé les médecins anesthésistes pour l’utilisation ou la non utilisation du monitorage BIS®, n’a pas retrouvé de diminution des doses cumulatives d’hypnotiques en relation avec l’utilisation du monitorage BIS®   . L’utilisation du monitorage BIS ne modifiait pas l’incidence des récupérations prolongées en SSPI.  Les explications données par les auteurs concernant l’absence de diminution des doses cumulatives d’hypnotiques ainsi que de diminution des délais de récupération après l’anesthésie sont les suivantes : (i) les valeurs de BIS des patients monitorés étaient probablement trop basses (47 de valeur médiane) et il n’y avait pas eu de monitorage caché du BIS dans le groupe contrôle (en fait l’utilisation du monitorage BIS, n’étant pas basée sur un algorithme décisionnel formalisé ne s’était pas accompagné d’une diminution du surdosage anesthésique) ; (ii) les anesthésistes qui ont pris en charge le groupe de patients monitorés par le BIS n’étaient pas motivés pour la titration de l’anesthésie car les patients étaient hospitalisés (et non en ambulatoire) ; (iii) les 69 médecins anesthésistes qui ont été randomisés pour utiliser ou non le monitorage BIS représentaient un groupe hétérogène avec des pratiques trop diverses  .

Un essai multicentrique européen a comparé les concentrations téléexpiratoires de desflurane (associé au rémifentanil) entre en groupe de patients monitorés par le BIS ou le moniteur Aline ® et un groupe de patients sans monitorage instrumental  . La diminution des doses cumulatives d’agents hypnotiques n’est que le résultat d’une meilleure titration des agents hypnotiques et les algorithmes de titration ne sont pas encore élaborés ou encore moins validés.

 

Utilisation du monitorage BIS et réduction de l’incidence de la mémorisation periopératoire  

 

La mémorisation explicite périopératoire est un événement rare (1-2 cas pour 1000 anesthésies en l’absence de l’utilisation du BIS   . En plus de la confirmation de cette incidence, les auteurs ont montré que les épisodes de mémorisation explicite étaient associés à l’intubation trachéale (6/ 25 patients), à des perceptions auditives (11/ 25 patients), à une douleur (6/ 25 patients), à l’impossibilité de bouger (10/ 25 patients) et à l’angoisse (10/25 patients). En analyse multivariée, les facteurs de risque de mémorisation explicite étaient : (i) le statut ASA III/IV par rapport au statut ASA I (OR 2,41 ;  IC 95 % 1,04-5,6) ; (ii) le type de chirurgie comme la chirurgie abdominale ou thoracique (OR 2,63 ; IC 95 % 1,00-6,91), la chirurgie cardiaque (OR 3,58 IC 95 % 0,72-17,9), la chirurgie ophtalmologique (OR 11, 78 ;  IC 95 % 2,48-55,9), la chirurgie orthopédique (OR 1,55 IC 95 % 0,46-5,18) par rapport aux autres types de chirurgies. Ces résultats méritent plusieurs commentaires : (i) l’incidence de la mémorisation explicite semble constante dans des études réalisées à plusieurs années d’intervalle et sur plusieurs continents ; (ii) il suffit probablement de périodes courtes (quelques minutes) d’anesthésie inadéquate, contemporaines de stimuli nociceptifs comme l’intubation trachéale  mais aussi en l’absence de stimulations nociceptives pour entraîner un épisode de mémorisation explicite. Les résultats de l’étude de Sebel et coll.   ont probablement été à l’origine de l’alerte issue en octobre 2004 par la Joint Commission on Accreditation of Hospital Organizations (JCAHO) aux Etats-Unis concernant la mémorisation explicite per-opératoire (www.jcaho.org).

 

Est-ce que l’utilisation du monitorage de la profondeur de l’anesthésie permet de diminuer l’incidence des épisodes de mémorisation explicite péri-opératoire ?

            La réponse à cette question a été donnée en plusieurs étapes. En 2000, Aspect Medical Systems a rapporté 41 cas de réveils peropératoires sur plus d’un million d’anesthésies réalisées avec le BIS  . Dans 46% des cas, le BIS était supérieur à 65, dans 34% des cas le réveil n’a pas pu être repéré précisément dans le temps pour rechercher la valeur du BIS correspondante et pour le reste des patients (n=8) les valeurs du BIS n’étaient pas connues. Près de la moitié de ces réveils sont survenus pendant une anesthésie pour chirurgie cardiaque.

            En 2004, Ekman et coll. ont rapporté les résultats d’une étude rétrospective concernant l’impact du monitorage BIS sur l’incidence de la mémorisation explicite péri-opératoire  . Cette étude, bien que rétrospective, avait pour la première fois suggéré que l’utilisation du monitorage BIS pouvait diminuer d’environ 80 % l’incidence de la mémorisation explicite péri-opératoire. La confirmation de ces résultats a été apportée par Myles et coll. qui ont montré dans une étude prospective, randomisée que l’utilisation du moniteur BIS chez des patients à risque (voir Tableau I) s’accompagnait d’une diminution significative (p = 0,02) de 74 % de l’incidence de la mémorisation explicite

Pour résumer cette partie, il existe des preuves convaincantes que l’utilisation du monitorage instrumental de la profondeur de l’anesthésie avec le moniteur BIS permet de diminuer de manière statistiquement et cliniquement significative l’incidence de la mémorisation explicite. Les autres moniteurs d’estimation de la profondeur de l’anesthésie  qui calculent l’entropie spectrale (Datex-Ohmeda/General Electrics), ou d’autres paramètres de l’EEG (Narcotrend  ) sont encore dans les phases initiales de développement et ne permettent pas de définir un bénéfice clinique lié à leur utilisation. Enfin, l’on voit apparaître des approches d’estimation de l’analgésie basées sur l’analyse simultanée de plusieurs variables physiologiques   Pour que les conclusions des études cliniques soient appliquées en pratique clinique courante il serait nécessaire de (i) de bien définir dans chaque centre les catégories de patients considérés comme étant à risque de mémorisation explicite péri-opératoire ; (ii) intégrer dans le raisonnement clinique l’information que 2-3 minutes d’anesthésie inadéquate sont suffisantes pour induire une mémorisation explicite. Ceci implique qu’il est indispensable d’utiliser les alarmes du moniteur BIS. Les limites de ces alarmes doivent être définies en tenant compte du protocole anesthésique utilisé et surtout de la présence d’un morphinique (voir plus loin le paragraphe sur les algorithmes de titration de l’anesthésie en tenant compte des informations fournies par le moniteur BIS).  

Utilisation du moniteur BIS pour diminuer l’incidence du surdosage anesthésique

            Les résultats des études qui ont montré que l’utilisation du monitorage BIS permettait de diminuer les doses cumulatives d’agents hypnotiques suggèrent que dans la pratique anesthésique quotidienne, beaucoup de patients subissent un surdosage anesthésique. Les conséquences les plus visibles de ce surdosage sont le retard de réveil avec ses corrélats (durée accrue de séjour en SSPI) et éventuellement l’hypotension artérielle. L’utilisation des médicaments de durée d’action courte comme le propofol ou le rémifentanil permettent d’éviter les retards de réveil mais leur effet hypotensif reste présent à cause de leurs effets pharmacodynamiques  . En analyse multivariée les auteurs ont montré que trois facteurs étaient significativement associés à une augmentation du risque de mortalité à un an : (i) un score de comorbidité (OR 16) ; (ii) chaque minute de pression artérielle systolique en dessous de 80 mmHg (OR 1,03) ; et (iii) chaque heure passée en dessous d’une valeur du BIS à 45 (OR 1,24)  .

Ces résultats nécessitent plusieurs commentaires.  L’association statistique n’est pas une preuve de relation de cause à effet et il est impossible, dans une étude rétrospective, d’incriminer l’anesthésie comme cause de la mortalité à un an. Le fait que l’hypotension artérielle et le surdosage anesthésique sont des facteurs indépendants (analyse multivariée) du risque accru de mortalité à un an suggère qu’il est probablement utile d’inclure dans les algorithmes de titration anesthésique à la fois les informations fournies par le monitorage hémodynamique et celles fournies par le monitorage de la profondeur de l’anesthésie (un tel algorithme est proposé plus loin).  Cette étude devrait être analysée comme la première à attirer l’attention sur les effets potentiellement néfastes du surdosage anesthésique.

 

Comment réconcilier les informations apparemment contradictoires sur le sous- et le sudosage anesthésique et la capacité du monitorage de la profondeur de l’anesthésie à corriger les deux ?

Les études qui ont prouvé que le monitorage BIS était capable de diminuer l’incidence de la mémorisation explicite suggèrent fortement que certains patients ont un sous-dosage, au moins à certains moments, en agents anesthésiques. L’étude qui a montré une relation statistique entre le surdosage anesthésique et la mortalité à un an suggère que le surdosage anesthésique peut avoir des conséquences graves et que le monitorage de la profondeur de l’anesthésie pourrait détecter et éventuellement corriger le surdosage. L’interprétation des ces résultats, apparemment contradictoires, est que le monitorage de la profondeur de l’anesthésie pourrait permettre de corriger à la fois le sous-dosage et le surdosage en produits anesthésiques. Ceci pourrait concerner les patients ayant des besoins inhabituels en agents anesthésiques. Il est également probable que le même patient puisse avoir, pendant la même intervention chirurgicale et la même anesthésie générale, à la fois des périodes de sous- et de surdosage anesthésique. La détection et la correction des ces périodes impliquent plusieurs choses : (i) la définition des algorithmes de titration de l’anesthésie en tenant compte des informations fournies par le patient, le geste chirurgical (niveau de stimulation nociceptive), la pharmacologie rationnelle, les informations fournies par le monitorage de la profondeur de l’anesthésie et par le monitorage hémodynamique ; (ii) une résolution de l’ordre de la minute pour détecter et corriger les périodes d’anesthésie inadéquate. Cette résolution de l’ordre de la minute nécessite l’utilisation systématique des alarmes sur tous les moniteurs et une attention constante du personnel anesthésique en salle d’opération. 

 

Propositions d’algorithmes pour la titration de l’anesthésie en utilisant les informations fournies par le monitorage BIS

 

L’analyse des valeurs du BIS associée aux : (i) paramètres cliniques (par exemple perte de conscience, modification des valeurs hémodynamiques comme le pression artérielle et le fréquence cardiaque ; (ii) nouvelles techniques d’administration des agents intraveineux (perfusion continue, AIVOC) ou à la mesure des concentrations télé-expiratoires des halogénés permet de réaliser une administration plus rationnelle des agents anesthésiques.

 

Titration des agents anesthésiques à l’induction

Lorsque les hypnotiques sont administrés en perfusion continue, en AIVOC ou en inhalation le BIS permet d’intégrer la variabilité interindividuelle à la fois pharmacocinétique et pharmacodynamique. Souvent, surtout chez des patients âgés, le temps nécessaire pour que les valeurs du BIS diminuent à 60 est d’environ 10 minutes et les extrêmes pour un collectif de patient peuvent varier par un facteur 5 . Afin de diminuer l’incidence des phénomènes de mémorisation peropératoire, il est souhaitable de ne pas diminuer pendant l’entretien de l’anesthésie les Ce du propofol en dessous des concentrations qui ont permis la perte de conscience. La valeur de Ce prédite notée lors de la perte de conscience doit être analysée en fonction du type de prémédication et de la présence ou non d’un morphinique. Ce raisonnement ne peut pas être appliqué si les hypnotiques et le morphiniques sont utilisés par injection en bolus.

 

Utilisation du BIS pour évaluer les besoins en analgésiques.

             

Guignard et coll. ont montré que l’adjonction de rémifentanil (administré en AIVOC),  même à des concentrations élevées (16 ng/ml) ne modifiait pas la valeur du BIS pour une concentration donnée de propofol (4 µg/ml) avant une stimulation nociceptive   Ainsi, l’analyse du delta BIS, (à condition que les concentrations prédites au site effet et plasmatiques soient en équilibre) permet d’estimer les «besoins en morphiniques » pour un stimulus nociceptif considéré comme quasi maximal (l’intubation trachéale). Il est plus difficile de titrer les morphiniques pour des stimulations nociceptives dont l’intensité est considérée comme étant moindre que celle de l’intubation trachéale. Lors de l’intubation, Guignard et coll. ont montré que le delta BIS était corrélé au delta de pression artérielle (PA) et de fréquence cardiaque . Un algorithme, non validé, de modification des concentrations d’hypnotiques et de morphiniques en fonction des informations fournies par le BIS, la mesure de la pression artérielle et de la présence ou non d’une stimulation nociceptive est présenté dans le Tableau 2.

La titration des agents hypnotiques en fonction du BIS a des limites. La réduction importante des concentrations d’hypnotiques pour maintenir un BIS stable entre 40 et 60 peut exposer à un risque de réveil inattendu quand les concentrations atteintes approchent les concentrations de réveil ou la concentration pour laquelle le patient a perdu conscience (Figure). La relation entre le BIS et les concentrations d’hypnotiques n’étant pas totalement linéaire, une petite diminution de l’hypnotique peut entraîner une augmentation importante du BIS et un risque de réveil et de mémorisation.

 

            En conclusion, il existe indiscutablement des limites à l’utilisation du monitorage de la profondeur de l’anesthésie. Ces limites doivent être connues et les informations fournies par les moniteurs de profondeur de l’anesthésie doivent être validées par les cliniciens. Cette validation, comme pour les autres moniteurs utilisés pendant l’anesthésie, nécessite des connaissances de physiologie (EEG ou potentiels évoqués) et des technologies utilisées. Enfin, compte tenu de la complexité de l’état d’anesthésie, il est indispensable que la conduite de l’anesthésie ne soit pas basée exclusivement sur les informations fournies par les moniteurs de profondeur de l’anesthésie. D’autres informations sont indispensables comme celles fournies par la pharmacologie rationnelle (c'est-à-dire, concentrations prédites au niveau cérébral, pharmacocinétique, interactions hypnotiques morphiniques), les moniteurs hémodynamiques et le niveau anticipé ou observé de stimulation nociceptive. Malgré leurs limites, les moniteurs de profondeur de l’anesthésie constituent un vrai changement de la pratique et de l’enseignement de l’anesthésie qui va dans le sens de la rationalisation des connaissances et des pratiques.

 


 

 

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Tableau 1. Patients et situations cliniques considérés comme étant à risque de mémorisation explicite péri-opératoire dans l’étude de Myles et coll.  ADDIN

 

         Césarienne

         Chirurgie cardiaque (FEVG <30%, index cardiaque <2·1 L/min per m2)

         Sténose aortique sévère

         Hypertension artérielle pulmonaires

         Revascularisation myocardique à cœur battant

         Polytraumatologie avec hypovolémie

         Bronchoscopie rigide,

         Diminution de la réserve cardiovasculaire

         Hypotension artérielle per-opératoire nécessitant un traitement,

         Insuffisance hépatique terminale,

         ATCD de mémorisation

         IOT difficile anticipée (sans intubation vigile programmée)

         Intoxication alcoolique chronique documentée ou présumée

         Traitement chronique par benzodiazépines ou morphiniques

         Traitement avec inhibiteurs des protéases
Tableau 2

 

              PAM

 

  BIS

        

             ­PAM

  (> 20 % PAM normale)

 

    SD+                  SD-

 

     PAM normale

        du patient

 

    SD+              SD-

 

             ¯ PAM

   (< 20 % PAM normale)

 

    SD+                  SD-

 

 * > 60 ( > 1 min)

 *ou  dBIS > 10

  + BIS > 65

  ( > 1 min)

 

  arrêt SD           vérif M

  ­ M                 ­ H                              

  +/- ­ H             +/- M

  arrêt SD          ­ H

  ­ H

   +/- ­ M

traitement de l’hypotension

  


 

  arrêt SD

  ­ M                      ­ H              

   +/- ­ H                +/- ­M

   40 – 60

   ( > 1 min)

 

  arrêt SD           vérif M

  vérif M            anti-HTA

  anti-HTA

 

    

       Situation idéale

 

traitement de l’hypotension

  +/- réduire H ou M

 

     < 40

   ( > 1 min)

               vérif  M

              ¯ H

               anti-HTA

 

         ¯ H

 

        ¯ H  et +/- M

traitement de l’hypotension

Algorithme décisionnel pour conduite de l’anesthésie à l’aide du BIS utilisé à Nancy. Les conduites anesthésiques sont indiquées par ordre de préférence.

­,¯ : augmentation ou diminution de la dose ou la concentration de l’agent anesthésique. H : hypnotique ; M : morphinique ; anti-HTA : agent anti-hypertenseur. SD+ : existence d’une stimulation douloureuse nouvelle et /ou plus intense ; SD- : stimulation douloureuse  à un niveau constant ou absente; PAM : pression artérielle moyenne. Vérif : vérification que la concentration ou dose d’agent anesthésique correspond réellement à celle souhaitée. Ces recommandations n’ont pas été validées. Elles servent de base de réflexion et de conduite de l’anesthésie dans notre pratique clinique courante.

 


 

 

Figure : Limite de la titration des hypnotiques avec le BIS. Exemple d’anesthésie en chirurgie cardiaque de l’adulte (tracé obtenu avec le moniteur ASPECTÒ 1000).

Le propofol administré à l’aide du DiprifusorÒ, titré en fonction du BIS était à une concentration prédite dans le compartiment effet (Ce) de 1 µg.ml-1 et le sufentanil à un débit de 0,5 µg.kg-1.h-1. Alors que le BIS était à 45, le patient a manifesté des mouvements des membres (augmentation brutale du « signal EMG »  représenté en trait fin) précédant de plusieurs secondes la réaction importante du BIS qui indiquait le réveil du patient.